Lettre d’Abdoul

Je m’appelle [Abdoul Sall]. J’ai 30 ans, d’origine [Afrique de l’ouest]. Je suis présentement en détention au Centre de surveillance de l’immigration à Laval depuis le 10 janvier 2020 en attente d’être déporté au [pays]. C’est avec une grande inquiétude et une peur pour ma vie que je vous écris cette lettre pour solliciter votre aide; car au point où j’en suis-je suis vraiment désespéré.

Je suis gay et depuis que je l’ai avoué à ma famille j’ai été renié et mon père a arrêté de payer mes études. C’était en 2013. J’étais étudiant en informatique de gestion à [une université aux États unis]. Et c’est ainsi que je me suis retrouvé bloqué au États-Unis car j’ai ainsi perdu mon statut d’étudiant, je n’avais plus aucun soutien de ma famille et ne pouvais plus rentrer au [pays] car je ne pouvais plus vivre dans la maison familiale et aussi je savais que là-bas je ne pouvais pas avoir une vie normale car [au pays] la population est très intolérante et très violente envers la personne d’orientation sexuelle différente. Elles sont victimes de traitements inhumains.

J’étais dans beaucoup de difficultés aux États-Unis et je souffrais beaucoup. Mon seul soutien était ma sœur qui m’envoyer un peu d’argent quand elle pouvait et on s’est parlé de temps en temps au téléphone car elle vit au Canada, elle est étudiante. En 2017, elle m’a trouvé une avocate et m’a suggéré de venir au Canada et demander l’asile. Elle m’a convaincu qu’ici je pouvais espérer un avenir meilleur et que je serais accepté et respecté pour ce que je suis. J’avais retrouvé l’espoir et c’est ainsi que j’ai pris la route et suis venu demandeur refuge.

Cependant tout ne s’est pas passé comme prévu. Mon avocate ne s’est pas occupée de mon dossier comme il le faillait et c’est la raison pour laquelle ma demande d’asile n’a pas été accepté. Par exemple, le jour de mon audience je me suis rendu compte que mon dossier comportait des erreurs, sur ma date de naissance, et sur ma relation avec mon neveu qu’elle avait présenté comme étant mon fils. Aussi, aucun document n’a été déposé au soutien de ma demande à l’audience. Le juge a conclu que je n’ai pas établi que je suis gai.

Après que ma demande d’asile fût rejetée, j’ai été convoqué par les agents de l’immigration qui m’ont donné la possibilité de faire une demande de révision avant renvoi (ERAR) et m’ont signifié que si cette dernière était refusée je serais renvoyé au [pays].

Je suis alors parti demander assistance à mon avocate qui m’a fait savoir qu’il fallait que je paye mille dollars pour qu’elle m’aide. Comme je me suis disposais pas d’une telle somme j’ai dû faire la demande ERAR moi-même qui fût à son tour rejetée quelques mois plus tard.

J’étais de nouveau désespéré et j’ai recontacté mon avocate pour lui demander conseils. Elle m’a dit qu’il n’y avait plus rien à faire et que la seule chose que je pouvais faire était de changer d’adresse et de numéro de téléphone, de rester caché jusqu’à ce que je me mari avec quelqu’un et de faire une demande de parrainage.

J’ai alors quitté mon appartement. En ce temps mon permis de travail expira. Je ne disposais plus d’argent et je n’avais plus d’autre choix que d’aller à une maison d’hébergement. C’était très dure car ce jour c’était le premier jour d’hiver. Heureusement, j’ai trouvé un hébergement qui a pu m’accepté. C’était un hébergement pour homme en situation de crise. Cependant, il ne pouvait m’offrir que 2 semaines d’hébergement.

Là-bas j’ai fait la connaissance d’une personne nommée H. Il était une personne à mobilité réduite il ressentait tout le temps de la douleur et je me sentais mal pour lui. Je l’aidais beaucoup dans ces déplacements et je l’assistais dans tout ce dont il avait besoin. Et c’est comme cela qu’on est devenu ami. On échangeait beaucoup. Il m’a raconté son histoire et moi de même.

Quand la durée de notre hébergement est écoulée, H m’a fait savoir qu’il allait emménager chez son frère. Il savait que je n’avais pas d’endroit où habiter, il m’a donc proposé de venir avec lui chez son frère. Il m’a dit que là-bas ils avaient une chambre libre que je pouvais louer et aussi qu’il va m’aider à trouver du travail et qu’il allait me mettre en contact avec un avocat qui pourrais m’aider.

J’ai accepté aussitôt. On est donc parti rencontrer son frère. Lui aussi était une personne à mobilité réduite. Il s’appelle M. Après que je lui ai expliqué ma situation, il m’a dit qu’il va me donner une chambre et de ne pas m’inquiéter pour la payer. Il m’a dit que je pourrais payer dès que j’aurais l’argent. Et à mon tour je lui ai dit que je pourrais les aider lui dans tout ce dont ils avaient besoin. J’ai emménagé, le jour suivant.

H ne m’a pas trouvé le travail qu’il m’a promis. Mais malgré cela j’ai quand même réussi à payer le premier mois grâce aux petits jobs que j’ai trouvée sur Kijiji. Je payais en tranches et avant la fin du mois j’ai pu compléter le paiement qui était une somme de 350 $.

Alors est venu le mois de janvier 2020. C’était le soir du 10. M est venu me trouver dans ma chambre et m’a dit que si je n’avais pas la totalité du paiement pour le 15, qu’il fallait que je sorte. J’étais très choqué après toute l’aide que je leur ai offert. Je lui ai alors dit que cela était illégal qu’il ne pouvait pas chasser les gens comme ça. Il est donc entré dans un moment de rage et a commencé à crier. Je n’avais rien compris alors je suis allé me réfugier dans ma chambre car j’avais très peur. Un court instant après la police était venu. M les avait appelés et leur a dit que rester un sans statut légal au Canada.

La police m’a donc arrêté et ils m’ont amené ici au Centre de détention. Après une semaine je suis allé voir une commissaire et il a dit qu’il allait procéder à ma déportation le 10 février prochain. Le commissaire a décidé de me garder encore en détention pour un mois de plus. Je retourne le voir le 17 février, si je suis toujours ici …