Justice pour Ivonne, un statut pour toutes et tous! Une déclaration du comité Refuges sans frontières lors de la journée internationale de la femme

JUSTICE POUR IVONNE, UN STATUT POUR TOUTES ET TOUS!

***Une déclaration du comité Refuges sans frontières lors de la journée internationale de la femme***

Lors de la journée internationale de la femme, nous avons pris les rues avec des centaines de montréalaises dans un acte de résistance contre le patriarcat, la précarité, et la violence.  Ce 8 mars, nous réaffirmons aussi notre appui de Mme Ivonne Hernandez et appelons de nouveau pour mettre fin à la déportation des survivant.e.s de violence basée sur les genres.

Ayant fui une relation abusive au Mexique, Ivonnne Hernandez est arrivée au Canada en 2009.  Quand sa demande d’asile fut refusée, elle choisit de défier son ordre de renvoi plutôt que de retourner vers une situation de danger et d’incertitude.  Entretemps, elle épousa un citoyen canadien et vit la naissance de son fils en 2012, malheureusement sa relation a commencé à se détériorer dans une dynamique de violence croissante et de menaces répétées.  Le 11 décembre 2013, Ivonne prit la décision difficile de quitter sa relation et chercha refuge dans une ressource en hébergement pour femmes.  Son conjoint la dénonça immédiatement à la police, affirmant qu’elle avait kidnappé leur enfant.  Lors d’une audience en cour familiale le 10 janvier 2014, le juge accorda la garde temporaire unique au père dans une décision choquante, attribuant sa décision au statut précaire et les moyens financiers limités d’Ivonne.  Le 22 janvier, Ivonne fut arrêtée et détenue lors une descente publique et planifiée, lorsqu’elle s’est présentée à un rendez­-vous régulier pour visiter son fils.  Malgré qu’elle fut libérée deux jours plus tard, elle a reçu une date de déportation pour le 7 février.

Une couverture médiatique extensive, le soutien public, et plus d’une cinquantaine de lettres d’appui de la part des groupes et centres de femmes à travers le Quebec se sont matérialisées comme une tempête imprévue.  Face à l’opposition publique et une mobilisation importante, Ivonne a reçu un sursis de renvoi le 4 février.  La semaine passée, elle a été réunie avec son fils après qu’un juge de la cour familiale lui ait accordée la garde complète temporaire.  Cependant, malgré ces victoires importantes, Ivonne doit continuer à se battre pour régulariser son statut et retenir la garde permanente de son fils.

Ivonne n’est pas seule dans sa lutte.  Aujourd’hui nous nous souvenons aussi de Grise, une réfugiée mexicaine qui a été tuée peu après sa déportation du Canada.  Nous saluons la lutte de Evelia Castrejon Santoyo qui a été forcée de retourner au Mexique après que son traitement de chimo­thérapie fut interompu et qu’on lui ait refusé accès à des services essentiels en situation de danger pour sa vie.  Nous dénonçons la mort tragique de Lucia Vega Jimenez qui a mis fin à sa vie dans une cellule de détention de l’Agence de services frontaliers plutôt que subir sa déportation. Surtout, nous commémorons les maintes survivantes anonymes, de noms inconnus et d’histoires invisibles mais qui continuent de vivre dans une précarité constante à l’intersection entre les violences genrée et étatique.

L’histoire d’Ivonne souligne les défis auxquels font face les survivantes de violence conjugales sans­-statut.  La décision de quitter une relation abusive est sans exception un choix difficile, qui demande un courage et volonté d’auto­détermination énorme.  De plus, des lois d’exclusion et d’expulsion agissent de concert avec d’autres systèmes d’oppression pour laisser les survivant.e.s sans statut dans une énorme précarité. Dans le contexte de la violence interpersonnelle, les auteurs des actes de violence profitent du statuts précaires pour réduire au silence et intimider leurs partenaires.  Il est commun pour les conjoints abusifs d’exploiter la promesse du parrainage, ou de menacer de dénoncer leurs partenaires aux autorités d’immigration comme moyens de coercion.

En outre, plusieurs femmes vivant sans statut doivent se confronter à des opportunités d’emploi restreintes, l’inéligibilité à des programmes de soutien financier, et un manque d’accès aux services sociaux, ce qui se traduit en peu ou pas de moyens pour se soutenir elles­mêmes.  Il y a aussi des instances où des mères sans statut perdent la garde de leurs enfants, lorsque leur capacité de rester dans le pays est remise en question.  La menace quotidienne de la détention ou la déportation décourage maintes survivantes de mettre fin à des situations dangereuses, car les processus pour porter plainte ou appeler les services d’urgence sont porteurs, avec eux, du risque de déclencher les mécanismes qui pourraient se solder par une déportation éventuelle.

Quand les survivant.e.s arrivent à quitter les relations abusives, elles continuent de se faire cibler par les agents d’immigration et frontaliers.  Nous avons entendu plusieurs rapports perturbants d’agents frontaliers qui collaborent avec des conjoints abusifs afin de retracer les survivantes sans statut.  Malgré des années de mobilisation par la campagne Shelter | Sanctuary | Status à Toronto, qui a obtenu une directive interdisant les agents frontaliers de s’introduire dans les maisons d’hébergement et des services de soutien dans la région de Toronto, cette directive fut renversée en 2011.  Jusqu’à maintenant, l’ASFC refuse d’octroyer des lignes directrices ordonnant aux agents de respecter ses maisons d’hébergement comme des espaces de refuge pour les survivantes de violence.

Les survivant.e.s devront être capable de chercher le soutien sans peur de la détention ou la déportation.  En refusant l’accès à des services, en divisant les familles et les communautés, et en déportant les survivant.e.s vers les situations de danger, le système d’immigration perpétue la violence faite aux femmes.  Nous appelons au gouvernement de cesser toutes les déportations et d’accorder le statut à tou.te.s les survivant.e.s de la violence genrée.  Nous affirmons que les hébergements devront être des espaces sécuritaires, sans l’incursion des agents frontaliers.  Nous croyons qu’aucune mère ne devrait se voir séparer de son enfant pour des raisons de pauvreté ou de statut précaire.  Dans le contexte d’un système d’immigration raciste et intransigeant, nous réaffirmons notre engagement à ouvrir l’accès à des hébergements et refuges et à lutter pour des espaces sécuritaires pour tou.te.s les survivant.e.s de violence, peu importe leur statut.  En tant que travailleuses des hébergements, des organisatrices dans les centres de femmes, les migrant.e.s, féministes et allié.e.s, nous revendiquons la justice pour Ivonne et un statut pour toutes et tous!

Le comité Refuges sans frontières est un réseau de travailleuses dans des maisons d’hébergement, des organisatrices dans des centres de femmes, des migrant.e.s, des féministes et des allié.e.s.  Nous agissons pour augmenter l’accès aux ressources d’hébergement et de soutien pour les femmes et trans vivant sans statut et survivant.e.s de la violence.  Faisant partie de la campagne Cité sans frontières, nous exigeons la fin à la détention et la déportation des survivant.e.s sans statut.  Nous faisons aussi appel aux agents frontaliers et les autoritiés d’immigration de reconnaître et respecter les maisons d’hébergements et les centres contre la violence comme des espaces de refuge.

Pour plus d’informations, veuillez envoyer un courriel à: refugesansfrontieres@gmail.com